24 octobre 2010

Ô PIGNON

Là, je n'en reviens simplement pas. Comment Canoë Info a-t-il pu laisser Jacques lanctôt écrire une si stupide analyse sur son site?

Voilà qu'après l'Ex Colonel Williams, ce n'est qu'un début, l'armée canadienne serait un formateur de plein de cas semblable par delà ses formations. Je ne pensais pas qu'un journaliste aurait eu si peu de jugement pour apporter une telle analyse. Et le monsieur s'appui sur le commentaire d'une amie qui a été employé sur une base militaire de "recrues" (St-Jean) et y a vu des comportements disgracieux (sans toutefois valider les raisons ou rapporter un comportement inacceptable).

Je ne suis pas journaliste monsieur Lanctôt, mais j'avoue que je me serais sans doute appuyé sur des analyses d'autres monstres qui ont fait le même genre de crime afin de me faire une opinion bien assise avant de profiter de ma visibilité sur une tribune comme Canoë pour accuser un "fabricant de monstre".

Enfin, pour le bénéfice de mes lecteurs, voici le texte en question:

Comment fabrique-t-on des monstres?


Chronique de Jacques Lanctôt sur Canoë Info



Les dernières images du colonel Russell Williams en travesti et portant de la lingerie féminine ont de quoi en dégoûter plus d’un. Comment un haut gradé de l’armée canadienne, hier encore commandant en chef de la base militaire de Trenton, en Ontario, a-t-il pu déjouer tous les systèmes de sécurité et mener cette double vie? Comment un tel monstre a-t-il pu gravir tous les échelons de cette institution qui s’appelle l’armée canadienne, en montrant chaque fois patte blanche et en se montrant plus catholique que le pape?

Certains psychanalystes parleront de prédispositions existant chez l’individu en question, un psychopathe sorti de nulle part. Mais pour moi, cet homme est le produit d’un système de pensée, et nul doute qu’il y a d’autres Russell Williams dans l’armée canadienne, celle-là même qui dit vouloir apporter la civilisation en Afghanistan, celle-là même qui a été envoyée pour terroriser le Québec en 1970 et tenter de faire reculer l’idée d’indépendance.

Je me souviens de la crise d’Oka, durant l’été 1990, il y a à peine 20 ans. Vous vous rappelez de cette image qui a fait le tour du monde? Un jeune et petit soldat de l’armée canadienne fixait droit dans les yeux un Mohawk musclé qui l’invectivait vertement. Le soldat avait reçu l’ordre de ne pas broncher, de ne pas rouspéter, de ne pas répliquer. Cette attitude semblait extraordinaire, une prouesse, la preuve d’une maîtrise totale de ses émotions pour le commun des mortels.

J’avais une collègue éditrice qui était aussi enseignante de français à la base militaire de Saint-Jean, en banlieue de Montréal. Ce n’était pas un job de tout repos. Elle m’avait alors expliqué que l’attitude de ce jeune soldat était tout-à-fait naturelle. Ce dernier avait été formé à la dure, comme des milliers d’autres recrues à travers le Canada. Et elle m’expliqua que tous les jours, ce jeune soldat croisait dans les couloirs de l’école un officier devant lequel il devait s’arrêter et recevoir les pires insultes.

Il faut connaître la nature de ces insultes pour comprendre comment ce système forme des monstres tels que le colonel Williams. Pour endurcir la recrue, pour «former son caractère», l’officier l’insultait en s’attaquant en premier lieu à sa mère, la première des femmes. Dans la bouche du haut gradé, la mère devenait une sale pute, une salope, une chienne, une moins que rien. Et la recrue était entraînée à essuyer la pluie d’injures sans broncher. Le jeune soldat en formation devait accepter de voir sa mère traitée des pires qualificatifs et traînée dans la boue. Aussi, lorsque le Mohawk en question insultait le jeune soldat devant les caméras du monde entier, ce dernier en avait vu d’autres et des pires et il a simplement respecté la discipline qu’on lui avait inculquée. «Aucun exploit là-dedans», avait conclu mon amie éditrice. Rien à voir avec l’attitude d’un Zidane, par exemple, qui n’avait pu s’empêcher de donner un solide coup de tête au joueur italien qui venait d’insulter sa sœur.

Alors doit-on se surprendre aujourd’hui que ce sont d’abord des femmes qui sont les premières victimes de ceux qu’on forme dans la haine des femmes? Si ce sont des femmes qui ont servi de bouc émissaire à la furie de Marc Lépine, en 1989?

On est encore à l’ère du Full Metal Jacket, le film de Stanley Kubrick, et de l’entraînement militaire basé sur l’humiliation et l’injure.

Nous sommes en droit de savoir maintenant quelles ont été les prouesses militaires du colonel Williams. Qu’a fait cet assassin, tout le long de sa carrière de militaire, pour mériter la confiance de ses pairs et gravir un à un les échelons jusqu’à obtenir le grade de colonel? Plus que les images tristes et grossières qu’on nous a montrées dans les médias, ce sont ses faits d’armes que je veux connaître et sur quels terrains de jeu ce militaire malade du système qui l’a formé a chanté le Ô Canada honteux, les armes à la main.

Si j'en crois vos paroles monsieur Lanctôt, nous allons maintenant juger de la culpabilité d'un criminel selon son métier. Ainsi, un enseignant qui se fait prendre pour pornographie juvénile nous fera craindre tous les enseignants, et un journaliste qui aura fait un viol nous fera craindre tous les journalistes.

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